samedi 30 mars 2013

Qu'est ce que la religion (Amadou Hampaté Bâ)


Cissé nivelle le sable, y imprime un point et dit :"Interroge-moi." Antiamba questionne et Cissé répond :
Qu'est-ce que la religion ? *
- La religion est une voie (un chemin).
Combien y-t-il eu de voies ?
- Il y en a eu 73.
Quel est leur état ?
- Les 72 premières sont des voies de l'erreur.
La soixante-treizième seule est le sentier de la rectitude, l'unique menant à DIEU.
Depuis notre père Adam jusqu'à notre Seigneur Mohammed, tous ont longé le même sentier :
Il a nom l'Islam (1).
C'est le sentier de la délivrance.
C'est la voie du salut, la voie Hanafiya (2).
Sur quoi ce sentier est-il édifié ?
Il est édifié sur trois piliers qui sont :
A. ISLAM  (soumission à DIEU)
B. IMÂN  (foi)
C. IHSÂN (comportement parfait)

En quoi consiste l'Islam ?
L'islam comporte cinq actions obligatoires.
Quelles sont-elles ?
Ce sont :

AI. L'articulation de la double formule de profession de foi, sans laquelle aucun acte ne peut être valable :
" Je témoigne qu'il n' y a de dieu que DIEU, unique et sans associé; je témoigne que Mohammed est Son serviteur et Son envoyé."

A2. L'accomplissement des cinq prières quotidiennes.
A3. Le paiement de la zakkat (dîme annuelle destinée aux nécessiteux).
A4. Le jeûne du mois de Ramadan.
A5. Le pèlerinage à la Maison sacrée, à la Mecque.
A6. Quant à ce pèlerinage, c'est pour celui qui peut le faire (c'est à dire celui qui a les moyens, tant physique que matériels, de l'accomplir).

Tels sont les dogmes fondamentaux du degré Islam (résignation, soumission à DIEU).
En quoi consiste l'Imân (foi) ?

L'Imân consiste à croire à six principes :
BI. en DIEU,
B2. au Jugement dernier,
B3. aux Anges,
B4. aux Livres révélés (3),
B5. aux Prophètes de DIEU (4),
B.6 et aux décrets de DIEU.

B7. Que ce décret comporte quelque chose de réjouissant
B8. ou de pénible,
B9. réjouissant comme le fait d'avoir un bon fils,
B10. pénible comme l'union avec une mauvaise épouse,
B11. croire, dans les deux cas, que toutes choses nous viennent de DIEU.

En quoi consiste l'Ihsân (le comportement parfait) ?
L'Ihsân ordonne :

CI. Adore DIEU
C2. comme si tu Le voyais,
C3. car si tu ne Le vois pas,
C4. Lui te voit .

Antiamba poursuivit :
- Je t'ai consulté sur les voies. Tu m'as dit qu'il y en avait soixante-treize. Tu en as choisi une et tu as affirmé qu'elle était la vraie, la seule menant droit à DIEU. Tu m'as dit que ce sentier était édifié sur trois piliers : Islam, Imân et Ihsân. J'ai compris que chacun de ces piliers se composait d'actes et de principes. Ainsi l'Islam en comprend cinq, l'Imân six et l'Ihsân quatre. Sois patient, Cissé, je suis novice. Il importe beaucoup pour moi de te questionner afin de mieux préciser mes connaissances.
Cissé, toujours complaisant, lui dit :
- Interroge-moi sans te gêner. Je ne te cacherai rien de tout ce que je sais.
- Quel est, dit Antiamba, l'enseignement ésoterique de la double formule de profession de foi, la Shahada ?
Cissé posa d'abord son doit sur Islam (AI), puis le descendit et fit un nouveau point (A7) pour le developper :
A7. Le Créateur fit pour toi deux miracles notoires :
A8. Il te donna la vie,
A9. Il la développa en toi.

L'homme est tenu d'en témoigner.
L'une et l'autre de ces manifestations Divines ont chacune leur terme.
A.10 DIEU modèle l'homme dans une poche située dans le ventre de sa mère et l'y tient en vie par l'effet de Sa puissance, jusqu'au terme prescrit;
A11. Puis, Il lui fait voir le jour par la naissance. Il l'assiste de Son efficacité jusqu'à la consommation de la croissance.
A12. A l'âge qu'Il choisit, Il le dote d'un Esprit (Raison) et lui impose des devoirs.
A13. Le premier acte, avant tout devoir, est l'articulation de la formule de profession de foi (Shahada).

Les docteurs ont affirmé que quiconque ignore l’enseignement ésotérique de la Shahada ne jouira point des privilèges attachés à l'Islam.
- Quel est dont l'enseignement caché de la Shahada ?
- C'est la connaissance en DIEU.
- Que connait-on en DIEU ?
- Ce que l'ont peut connaître en DIEU n'est pas tangible. On peut connaître de DIEU trois états :

A14. ce qui Lui est nécessaire,
A15. ce qui Lui est impossible,
A16. ce qui Lui est contingent.
- Qu'est-ce qui est nécessaire à DIEU ?
- Vingt-cinq attributs sont nécessaires à DIEU :

D1. l'existence,
D2. l'éternité,
D3. la possession,
D4. la transcendance,
D5. l’indépendance,
D6. l'unicité,
D7. la puissance,
D8. la volonté,
D9. la science,
D10. la vie,
D11. l'ouïe,
D12. la vue,
D13. la parole,
D14. être puissant,
D15. être voulant,
D16. être savant,
D17. être vivant,
D18. être entendant,
D19. être voyant,
D20. être parlant,
D21. être sans besoin,
D22. être non astreint à l'oeuvre,
D23. être non soumis  à une obligation,
D24. être non soumis à une coutume,
D25. être promoteur de la création (5).

- Qu'est-ce qui est impossible à DIEU ?
- 25 attributs sont impossibles à l'égard de DIEU :
E1. l'inexistence,
E2. le début,
E3. l'envie,
E4. la concurrence,
E5. le besoin,
E6. l'existence d'un pair (d'un semblable à Lui).
E7. la pauvreté,
E8. la nécessité,
E9. l'ignorance,
E10. la mort,
E11. la surdité,
E12. la cécité,
E13. le mutisme,
E14. l'insuffisance (faiblesse)
E15. la contrainte,
E16. être ignorant,
E17. être inanimé,
E18. être sourd,
E19. être aveugle,
E20. être muet,
E21. être dans le besoin,
E22. être astreint à une oeuvre,
E23. être contraint à quoi que ce soit,
E24. agir par habitude,
E25. être postérieur à la création.

- Qu'est-ce qui est contingent à DIEU ?
- Le contingent, pour DIEU, constitue une sorte de voie médiane entre les attributs nécessaires et les attributs impossibles. Le contingent peut soit exister (comme le "nécessaire") soit ne point exister (comme l' "impossible"). Par exemple, le fait, pour DIEU, de créer ou de laisser dans le néant est contingent.

Les vingt-cinq attributs nécessaires, plus les vint-cinq attributs impossibles, constituent les cinquante articles de l’enseignement caché de la première partie de la Shahada :
" Je témoigne qu'il n' y a de dieu que DIEU, Unique et sans associé."

- Quel est donc l'enseignement ésotérique de la seconde partie : " Je témoigne que Mohammed est le Serviteur et le Messager de DIEU " ?

- C'est la connaissance des prophètes (6).
- Comment connaît-on les prophètes ?
- Les Prophètes se reconnaissent à trois états :

A17. à ce qui leur est nécessaire,
A18. à ce qui leur est impossible,
A19. à ce qui leur est contingent.

- Qu'est ce qui est nécessaire  aux prophètes et qu'est ce qui leur est impossible ?

- Sont nécessaires aux Prophètes :
F1. la Foi,
F2. l'intégrité,
F3. la transmission.

De ce fait, leur deviennent impossibles :
G1. la mécréance,
G2. la perfidie,
G3. la dissimulation.

- Qu'est-ce qui est contingent aux Prophètes ?

F4. Les prophètes sont soumis aux contingences humaines;
G4. il leur est donc impossible d'être au-dessus des contingences humaines.

- En quoi consiste la foi des prophètes ?
- Elle consiste, pour eux, à croire :

F5. aux Prophètes devanciers,
F6. aux Anges,
F7. aux Livres révélés,
F8. au Jour de la Sentence.
Il est donc impossible aux prophètes de nier :
G5. les Prophètes devanciers,
G6. les Anges,
G7. les Livres révélés,
G8. le Jour de la Sentence.

L'ensemble de ce qui est nécessaire, de ce qui est impossible et de ce qui est contingent pour les Prophètes, ajouté à leurs articles de foi, constitue les seize articles de l'enseignement ésotérique (7)  de la seconde formule de profession de foi : " Je témoigne que Mohammed est le Serviteur et le Messager de DIEU."

Nous avons rapporté l'assertion des Docteurs : " Quiconque ne possède pas la connaissance de l'enseignement caché de la double  formule de profession de foi l'articule sans effet." Or, celui qui l'articule sans effet n'est pas croyant, et l'incrédule n'est pas dans la voie du salut.

Nous sommes donc  heureux de savoir - et nous en remercions DIEU - que l'enseignement de la Shahada comprend Cinquante articles pour la première formule et Seize pour la seconde, soit au total : 66 (8).

Puisse DIEU, qui nous a fait connaître ces soixante-six points, nous faire proférer la Shahada au moment de notre mort, comme dernier acte de notre vie. Amîn.

source : vie et enseignement de Tierno Bokar (Amadou Hampaté Bâ).








* lire en premier le pacte primordial 2



1. Le mot Islam signifie littéralement "soumission à DIEU", acceptation totale de Sa volonté. Le mot ne désigne donc pas ici la seule religion historique révélée à la Mecque, mais la Religion primordiale, immuable, éternelle de soumission à DIEU qui à été pratiquée par tous ceux qui se voués à Son adoration depuis Adam.
2. Hanif (les purs): nom donné à certains hommes de DIEU qui vivaient dans le désert avant l'apparition historique de l'Islam et qui s'adonnaient à l'adoration du DIEU unique. Les hanif sont censés avoir toujours existé. Abraham est considéré, en islam, comme le plus grand des hanif. La Hanifiya est donc la voie de la Religion pure, éternelle, la voie de l'adoration de DIEU pour Lui-même.
3. " Dites : Nous croyons en DIEU, à ce qui nous a été révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, à Ismaël, à Isaac, à Jacob et aux tribus; à ce qui a été donné a Moïse et à Jésus  à ce qui à été donné aux prophètes de la part de leur Seigneur. Nous n'avons de préférence pour aucun d'entre eux et nous nous soumettons à DIEU." (Coran II, 130)
4. Il doit croire également aux Prophètes que DIEU a envoyés sur la terre avant le prophète Mohammed et leur accorder le même respect qu'à ce dernier. Leur nom est précédé de la même formule Saïdnâ (Notre Seigneur) est suivi  de la même salutation : "Sur lui la Paix et le Salut !"
5. Ces attributs sont tous tirés du Coran.
6. Le prophète Mohammed typifie, ici, l'ensemble de tous les autres  prophètes envoyés par DIEU.
7. Dans toute cette leçon, ce qui est appelé "ésotérique" ne constitue, en fait, que les "portes" de l'ésotérisme, une première approche destinée à être suivi d'un long approfondissement, tant par la voie de renseignement que par la voie de l'expérience. Chaque attribut mentionné comporte tout un développement. 
8. L’intérêt de ce nombre 66 est qu'il correspond à la valeur numérale du grand nom de DIEU (ALLAH), selon l'arithmologie dite "maghrébine" des lettres arabes : Alif = 1, Lam =30, = 5. La connaissance de la Shahada est donc liée à la connaissance de DIEU.


mardi 19 mars 2013

Conscience sans objet: Al-Ghazali

Conscience sans objet: Al-Ghazali: Ghazâli est l'un des plus grands penseurs de l'islam. Philosophe, juriste, théologien, il enseigna à l'université de Bag...

samedi 16 mars 2013

LE PACTE PRIMORDIAL 2 (Amadou Hampaté Bâ)

... 
o. C'est par la Raison que l'on entretien la religion.
p. C'est par la Raison que l'on gouverne le monde.
q. Sans la Raison, point de religion.
r. Sans la Raison, point de relation.

5 Consacre ta Raison à la religion :
s. la vie matérielle te sera chose plaisante.

6 Voue ta Raison au monde matériel :
t. tu courras de grands risques,
u. tu te porteras tort,
v. car tu auras bravé l'Invincible.

Pourquoi ?
Parce que, à tout ce qu'Allâh créa, il préféra la Raison (l'Esprit) et, dans ce qu'Il créa, c'est le monde matériel qu'Il abandonna le plus à lui-même.
Or, il prit ce qu'Il estime par-dessus toute valeur et Il te l'impartit, afin que tu en uses et en tires profit; mais toi, en insoumis, tu vas consacrer ce trésor à ce qu'Il néglige le plus; au temporel, à l'acquisition éphémère.
x. Tu fais donc l'imprudent;
y. Tu t'égares.
z. Puisse Allâh me venir en aide, ainsi qu'à toi.

C'est la Raison qui te fit connaître :
7 Le Livre (Coran)
8 La Tradition (la sunna)
9. Le Consensus (idjmâ)
Quel est le commandement du Livre ?
7 Il est écrit en commandement dans le Livre :

" O vous qui croyez en DIEU ! Préservez vos âmes et celles des vôtres du feu."
De ce fait, il est obligatoire pour chacun de se connaître, de se conduire selon la Loi Divine (sharia) et de veiller à ce que sa famille fasse de même.

Notre Seigneur Ali (1) (que DIEU l'ait en sa miséricorde) a dit :
" Enseignez à vos parents les préceptes du bien."
C'est là le sens du verset précité.
Donc, chacun a la mission Divine d'enseigner à sa famille la théologie (2), la purification rituelle et la prière.
Alors seulement sa responsabilité vis-à-vis de sa famille sera dégagée. Il n'y aura pour lui aucune admonestation au jour du Jugement dernier.

Quel est le commandement de la Sunna (tradition) ? 8
Il est écrit dans la Sunna :

" Chacun de vous est un berger, et chaque berger doit un compte de son troupeau." (3)
Le chef de l'Etat, le maître de la cité, les chefs de famille et les individus isolés, tous auront à fournir une justification. Celui qui rendra un compte clair et facile obtiendra une récompense qui tiendra compte du nombre et de l'importance de ceux qui lui avaient été confiés. La qualité de cette récompense n'amoindrira en rien la rémunération des serviteurs.

A celui qui sera mauvais pasteur, DIEU (qu'Il soit exalté !) dira : " O mauvais pâtre ! Tu t'es nourri de la chair des tiens, tu as sucé leur lait jusqu'à vider leurs mamelles, puis tu les  as laissés à la merci des hyènes. J'ai confié à ta garde quelques-uns  de mes serviteurs. Tu as joui de leurs services et tu ne leur as pas enseigné leur religion. Tu les as livrés à Satan qui les a égarés." Et le mauvais pâtre endurera un supplice égal à la somme des supplices de tous ceux qu'il aura laissé s'égarer. Mais cette punition n'atténuera en rien celle des sujets eux-mêmes.

Quel est le commandement du Consensus ? 9
Le Consensus dit :
" Ordonner le bien et interdire le mal est une obligation pour tout croyant."
Il faut donc, d'abord, s'ordonner le bien à soi-même, s'interdire tout acte d'iniquité et persévérer. Puis il faut agir de même avec tous nos parents et toutes les bonnes volontés qui se mettent à notre écoute. Il est clair que celui qui ordonne ce qu'il ne fait pas lui-même ne sera point obéi, non plus que celui qui interdit ce qu'il se permet à lui-même.

Maintenant que tu as entendu ce que le Livre, la Tradition et le Consensus ont prescrit, considère le comportement des hommes et examine comment ils se conforment actuellement à ces prescriptions. Force sera pour toi d'avouer que notre siècle est celui du relâchement, celui pendant lequel on assiste :
10 la diminution du nombre des instructeurs (des guides),
11 l'éclipse de la Science religieuse vraie.
Pour ces raisons :
12 la Religion se trouve négligée.
Cela fait de notre siècle un siècle des plus terrifiants.
Les sages de tous les temps ont souhaité ne pas être d'une pareille époque qui, par rapprochement, est celle durant laquelle :
13 le Bien n'est pas séduisant,
14 le Mal n'est pas repoussant,
15 la Vérité n'a pas d'effet,
16 le Mensonge n'a point de méfaits.
Le contemporain d'un temps si misérable vit dans la peine et dans l'inquiétude. A nous qui y vivons, puisse Allâh nous :
a. sauvegarder,
b. affranchir,
c. assister,
d. protéger,
e. et nous faire triompher des embûches de ce temps.
Toutefois, en dépit de toutes les apparences et de la corruption du temps, les prescriptions du Livre, de la Tradition et du Consensus demeurent pures et immuables.
Celui qui se laissera séduire par les attraits du monde se perdra par son propre mouvement, à moins qu'il ne reçoive une assistance occulte de DIEU (qu'Il soit exalté !).

Celui qui se souvient que des temps plus dépravés que le nôtre ont passé, sera conforté par la certitude que la Vérité Divine seule est permanente. Celui-là se conformera aux prescriptions des trois sources (4). Il abandonnera le monde au sort qui lui est prescrit par la Suprême Volonté.

En conclusion, il n'est, sur terre, que deux sortes de voies, menant vers deux cités :
17. La cité Qarârin (éternelle),
18. La cité Bavârin (périssable).
La cité Qarârin est une demeure de séjour stable et tranquille.
La cité Bavârin est une demeure de ruine et de perdition éternelle.
Quand Allâh créa le paradis, Il dit aux anges :
- Allez et voyez. J'ai créé quelque chose.
Les Anges allèrent voir, puis revinrent, épanouis. Ils dirent :
- O  excellent Maître ! Nous avons contemplé le paradis. Jamais nous n'avons vu séjour aussi agréable.
Allâh (qu'Il soit exalté !) leur dit :
- Retournez et regardez.
Avant que les anges ne fussent arrivés sur les lieux, Allâh entoura le paradis d'un cercle constitué de tout ce que l'âme repousse le plus.

Les anges virent le lieu et en furent accablés. Ils revinrent vers Allâh et dirent :
- O excellent Maître ! Nous avons trouvé le paradis enfermé dans un cercle d'épreuves impossible  à franchir sans l'assistance de Ta Magnanimité.
Allâh leur dit :
 - Allez, j'ai créé autre chose.
Les anges retournèrent sur les lieux. Ils y trouvèrent l'enfer obscur, lugubre, puant, expression du châtiment ultime. Ils en furent consternés. Puis ils revinrent.

- O Maître ! dirent les anges, nous avons vu l'enfer. Il ne nous a jamais été donné de voir un lieu aussi effroyable. Quiconque verra l'enfer se gardera d'y pénétrer.
Allâh leur dit :
- Retournez et regardez.
Les anges retournèrent et trouvèrent l'enfer ceint d'un cercle de plaisirs irrésistibles. Ils revinrent vers DIEU :
- Excellent Maître ! Nous avons visité l'enfer; mais avec les éléments qui l'entourent, nul n'échappera à ce précipice sans Ta Divine assistance, tant les plaisirs de ses rives sont désirables et attirants.

Le prophète de DIEU a dit, en effet :
"Le paradis est entouré d'un cercle d'épreuves pénibles et l'enfer d'un cercle d'éléments attrayants".
Nous pouvons en inférer que les prescriptions
du Livre, 7
de la Tradition, 8
du Consensus, 9
constituent les épreuves qui entourent le paradis.
Les facilités de la vie sont les éléments qui circonscrivent l'enfer.
Et toi, néophyte, grâce à :
ta Raison, 4
tu as pu juger et conduire tes déductions jusqu'à ces trois conclusions :

1) Quelle que soit la rigueur des épreuves périphériques du paradis, les tourments de l'enfer (18) sont plus effroyables et plus durables;

2) Quelle que soient les délices des éléments circonscrivant l'enfer, le paradis (17) est plus délectable et plus durable;

3) Enfin, subir une épreuve éphémère (17), rétribuée par une délectation éternelle, est plus avantageux qu'une jouissance éphémère (18) suivie d'un supplice perpétuel.
Alors, dis-toi : je ne m’intéresserai désormais qu'à mon salut. Je ne suis l'intercesseur de personne. Je ne puis ni ne dois rien imposer à quiconque. Quand à moi-même, je suis  décidé à m'appliquer les prescriptions du Livre, de la Tradition et du Consensus, et ce jusqu'à ma  mort.
Si oui, ami, écoute, ne te leurre pas. Sache avant toute chose, car le fait est avéré, que quiconque se propose de vivre conformément aux prescriptions du Livre, de la Tradition et du Consensus, choisit une vie de prisonnier.
Pourquoi ?
Parce que le prophète de DIEU a dit :
" La vie terrestre est une prison pour le croyant et un paradis pour le mécréant."

Tu vas entreprendre la conquête de la Science religieuse et commencer par le Coran.
19 Acquiers-en le premier soixantième; à défaut, la connaissance des onze sourates suivantes : I, CV, CVI, CVII, CVIII, CIX, CX, CXI, CXII, CXIII et CXIV, suffit largement;

20 Acquiers les notions sur la théologie (tawhid), ne serait-ce que le sens ésoterique de la shahada  (5). Cette connaissance est indispensable et elle est largement suffisante;
21 Acquiers la science des prescriptions de la purification rituelle et, enfin,
22. Fais-toi initier au soufisme.

Cette initiation te fera connaître la vraie figure de notre Seigneur Mohammed. Tu sauras comment s'écoula sa prodigieuse vie sur terre, le vrai sens de son enseignement et la portée de sa reforme religieuse et sociale.

Quant au monde matériel, notre Seigneur Mohammed le compara à un dépotoir, à une charogne, et ceux qui le convoitent à des chiens.
Il te sera donc facile, connaissant l'exemple de notre Prophète, de te garder des tentations terrestres en dépit de tes appétits matériels.
à suivre...
source : Vie et enseignement de Tierno Bokar (Amadou Hampaté Bâ)





1. Gendre du Prophète et ancêtre des Chérifs.
2. Tawhid : tout ce qui se rapporte à l'Unicité de DIEU et à ses Attributs.
3. Hadith du Prophète.
4. Coran, Tradition et Consensus.
5. Shahada : littéralement "témoignage". Profession de foi musulmane. Sa première partie est " Je témoigne qu'il n'y a de dieu que DIEU, unique et sans associé" et sa seconde : " et je témoigne que Mohammed est Son serviteur et Son envoyé".

dimanche 10 mars 2013

LE PACTE PRIMORDIAL 1 (Amadou Hampaté Bâ)

Un vieux Dogon, les yeux dessillés par de nombreux voyages et par le contact avec d'autres ethnies, revint parmi les siens et leur dit :
- O mes parents ! Nous sommes dans l'erreur. Nos pratiques religieuses n'ont aucun sens. J'ai vu les religions de bien des pays, mais jamais je n'ai trouvé, en deux endroits, deux objets de culte strictement identiques. Chaque pays a les siens. On trouve même des idoles individuelles, l'une pour la mère, l'autre pour l'enfant. Idoles de la tribu, idole du clan,  fétiches particuliers, tantôt faits d'un éclat de pierre ou d'un morceau de bois, tantôt matérialisés par un poisson ou un serpent. Seule l'erreur peut être aussi  multiple. Chez les musulmans, au contraire, tout est homogène; paroles et gestes sont identiques. Les heures, les lieux et les appels à la prière sont semblables. Quand un musulman guérisseur trace les signes efficaces, tous les autres initiés peuvent les déchiffrer alors que, chez nous, les poudres et les éléments de nos philtres ne sont reconnaissables que de leurs seuls auteurs.

" J'en conclus que la Vérité est une et ne doit pas manquer d'harmonie dans sa manifestation. Je veux pratiquer l'Islam.
Ses auditeurs, sceptiques et très attachés au culte de leurs ancêtres, culte vieux de plusieurs milliers d'hivernages, lui disent :
- Si tu es gagné à l'Islam, va à Bandiagara, tu y trouveras tes partenaires.
Antiamba - c'est ainsi que s'appelait le vieux Dogon - vint donc à Bandiagara. Il aborda un passant et échangea avec lui les mots usuels de bienvenue. Il s'ouvrit de son désir d'être instruit dans la tradition Islamique. Son interlocuteur lui dit :

- Va chez Cissé. Il n'a d'autre occupation que d'enseigner la religion. Par lui, tu seras satisfait si DIEU le veut.
Antiamba se rendit chez Cissé, entra et salua :
- La paix sur vous, ô ceux d'ici!
Cissé répondit :
- Nous n'avons que la paix, la paix seulement. Que cette paix soit sur toi. Sois le bienvenu !"

La requête ayant été exposée, Cissé se disposa à instruire Antiamba, mais il se heurta à une difficulté majeure : Antiamba ne savait ni lire ni écrire; il ne parlait pas la langue rituelle, l'arabe; il ne savait que le dogon et le peul. Or, nul n'ignore la peine que l'on a à se faire entendre d'un être inculte, surtout lorsqu'il s'agit d'un entretien portant sur la religion. Mais Cissé, qui n'ignorait rien de la tradition musulmane, n'était pas sans connaître cette sentence du prophète de DIEU : " Parlez aux gens à la mesure de leur entendement."
Il se dit :" Cet homme ne peut lire dans un livre, mais si je me servais de la langue qu'il parle et de figures que je tracerais sur la terre, sa mémoire ne perdrait rien, ma tâche serait facilitée et le voeu de cet homme exaucé."

Il pensa alors à ce mot de notre seigneur Mohammed à propos des guides spirituels : "En chaque homme de DIEU est scellée une parcelle du secret de la Puissance de Divine. La vertu de cette parcelle lui permet de tirer la vérité d'entre le doute et le mensonge, comme on tire le lait d'entre le sang et les excréments."(1)

Sur le conseil de Cissé, le vieux Dogon apporta du sable fin et le répandit sur le sol. Celui qui, ignorant cette méthode, surprendrait un homme traçant des lignes et des points sur le sable en articulant des paroles croirait avoir à un géomancien ou à un dément. Pourtant, la méthode de Cissé, en dépit de son étrange aspect, est la seule qui soit compatible avec les conditions intellectuelles et matérielles de la masse. Celui qui voudrait instruire les siens selon les règles de la scolastique ne rencontrerait que l'échec. La méthode de Cissé est conçue à l'usage de la masse illettrée, en prévision de la mort qui n'attend pas et de l'ordre Divin qui ne s'abroge point. Elle aplanit toutes les difficultés. Linguistiquement, elle universalise l'enseignement et le rend accessible à tous les âges, à tous les goûts, à toutes les capacités, avec les plus grandes promesses de succès et dans le minimum de temps.

Cissé prit la parole :
1- Néophyte, le Maître te créa. Il accomplit en toi l'image d'Adam, la plus honorable et la plus belle des formes. Cette forme a été celle de notre seigneur Mohammed (sur lui la prière et la paix). Allâh préleva le plus précieux de ses diamants, te l'attribua et dit : "Voici, prends-en soin. Mais souvient-toi que je te le reprendrai.
En attendant :
2 - utilise-le,
3 - commerce avec.

a. Si tu l'entretien bien,
b. si tu l’accommodes,
c. et si  tu en retires un bénéfice,
le total du gain sera pour toi. Je n'en ai point usage. Par surcroît, je te donnerai un Royaume tel que jamais monarque n'en eut de semblable : le Paradis après la mort.

Il est écrit dans le Livre de Noblesse : " Quand à celui qui aura redouté de comparaître devant son Seigneur et qui aura préservé son âme des passions, en vérité, pour celui-là, le féerique Djanna (jardin) sera le lieu d'asile." (Coran LXXIX, 40-41).
Mais :

d. si tu le négliges,
e. si tu le taches,
f. si tu le souilles,
Je t'accablerai de tortures, plus accablantes que nul n'en subit jamais: le supplice de l'Enfer après la mort."

Il est écrit dans le Livre de Noblesse : "... Lors, quiconque aura outrepassé et aura préféré la vie de ce monde, en vérité, pour celui-là, le brasier Djahim sera le lieu d'asile." (Coran LXXIX, 37.)

4. Le diamant en question, c'est la Raison (2)
g. C'est cette Raison qui différencie l'homme de la bête.
h. C'est cette Raison qui, parmi les hommes, différencie le croyant de l'incrédule.
i. C'est cette Raison qui, parmi les croyants, différencie l'érudit de l'ignorant.
j. C'est cette Raison qui, parmi les croyants érudits, différencie le juste du méchant.

Parmi tous les animaux de la création réunis, qu'est-ce qui rend l'homme supérieur ?
k. la Raison.
Par quoi, dans l'ensemble des hommes, le croyant est-il considéré comme supérieur à l'incroyant ?
l. la Raison.
Par quoi, dans l'ensemble des croyants, le savant a-t-il l'avantage sur les dévots ?
m. par la Raison.
Par quoi, dans l'ensemble des savants, le Juste a-t-il l'avantage sur l'érudit ?
n. par la Raison
Certes, il est juste de célébrer la valeur de tout ce dont tu fus doté par ton Maître. Il a parfait en toi l'image d'Adam. Il t'a pourvu d'un diamant plus précieux que toutes choses. Par ce don, tu t'es différencié de la bête, du mécréant, de l'ignorant, et enfin du méchant. Il est juste que tu connaisses le Seigneur qui fit tant pour toi. Sa connaissance t'est d'ailleurs une obligation. Quand tu le connaîtras, alors tes deux vies (3) seront pleines de félicité.
Mais si tu le dénigrais, tu manquerais le but de cette vie et l'autre ne te serait point garantie.
à suivre...
source : vie et enseignement de Tierno Bokar (Amadou Hampaté Bâ)







1. Les pasteurs et nomades de jadis croyaient que le lait de vache était situé entre le sang et les excréments.
2. Il ne s'agit point ici de la "raison raisonnante", purement intellectuelle, mais de cette intelligence profonde, parcelle Divine insufflée par DIEU en l'homme, qui demeure parfois endormie chez certains hommes même s'ils peuvent paraître intellectuellement brillants.
3. Ici-bas et l'autre monde après la mort.

vendredi 8 mars 2013

La sincérité envers DIEU et Ses créatures - Cheikh al-Darqâwi

Rien ne te sera plus utile, ô disciple, que d'être sincère (sidq) avec ton Seigneur, s'agissant de l'accomplissement de Ses ordres et du respect de Ses interdits. Par DIEU, si tu te comportes ainsi avec Lui, tu verras des merveilles ! En effet, Il a dit : S'ils étaient sincères avec DIEU, cela leur serait bénéfique (Coran 47, verset  21).

Par DIEU ! Si nous étions sincères avec Lui, tellement sincères que nos ennemis finissent par l'être avec nous, ainsi que des gens dont nous n'aurions pu imaginer qu'ils le soient; si nous évitions de causer du tort aux serviteurs de notre Seigneur, à tel point qu'Il nous évite Lui-même les nuisances de quiconque, nous ne verrions alors que du bon dans les créatures et rien de mauvais. Personne ne nous nuirait, et ceux qui nous fuyaient ne le feraient plus. Mais la mort de notre ego, "son effacement, son anéantissement, son départ et sa disparition", ainsi que notre extinction de notre extinction, en sont les conditions préalables.

source: Lettres sur la Voie spirituelle (Cheikh al-'Arabî al-Darqawî)